| Le beau travail de fresque, pour la salle de Fêtes de la mairie d'Ivry, que le peintre Girieud et ses collaborateurs viennent de mener à bonne fin, participe de ces grands travaux artistiques dont s'honorèrent d'autres siècles ou d'autres pays.
Qu'on reprenne le problème tel qu'il s'est posé à la commission des Travaux artistiques désignée, on le sait, par l'entraide des artistes, quand M. Jacquelin, maire d'Ivry, proposa au commissariat ce travail. Il s'agissait d'animer une salle sans éclat, longue de 29 mètres, haute de neuf mètres, une brave salle de ces mairies de banlieue construites vers 1860.
Des surfaces libres à faire rêver les amateurs de grandes compositions; quelques baies vitrées sur une face, quelques portes perdues sur l'autre, une cheminée monumentale trop petite pour ce vaste espace, telles étaient les caractéristiques d'une salle assez belle, mais dont les lignes d'architecture étaient coupées de façon tout à fait inattendue par deux colonnes en stuc, défiant toute loi de l'esthétique, inutile tant par leur aspect que par leur rôle statique.
Un magnifique chantier s'offrait; 300 mètres carrés à décorer, dont un seul panneau de 145 m2. Rendons grâce, pour une fois, aux circonstances qui contraignirent à se passer d'un pareil métrage de toile. Car c'est une fresque, une vraie, faite de sable et de chaux, comme la traitaient avec tant de science les maîtres de l'antique, que nous sommes heureux de contempler.
Ce fut un magnifique chantier, réminiscence du passé où maître d'oeuvre et élèves réunissaient leurs talents dans une même communion de foi artistique et qui, en quelques mois, a fait de la grande cité ouvrière d'Ivry, un lieu destiné à marquer le retour de la peinture murale aux œuvres de caractère.
La fresque, c'est ce matériau idéal, appartenant au mur, faisant corps avec lui, donnant aux teintes une nuance veloutée, véritable peinture murale, remise à l'honneur depuis peu, et qu'il faut espérer revoir éclater de fraîcheur nos tristes façades nues.
Parmi les maquettes fort intéressantes qui furent présentées au concours, il serait injuste de passer sous silence celle de Fouqueray, dont certains morceaux représentaient de petits chefs d'oeuvre, telle sa course de régates sur la Seine; celle de Quelvée, débordante d'esprit et de grâce; celle de Souverbie, magicien des couleurs dont chaque touche est un morceau de soleil; celle de Narbonne, fougueuse, vibrante de gaîté.
La composition de Girieud, très ordonnée, de coloris calme et agréable, devait finalement rallier les suffrages en faveur d'un artiste qui connaît particulièrement le procédé de la fresque pour l'avoir étudié et pratiqué en Italie et en Egypte. Aussi il a pu mener son chantier en vrai chef d'orchestre, dirigeant une équipe de quinze collaborateurs, donnant le ton, corrigeant les fausses notes, tenant la mesure d'une brillante symphonie dont les clairs accords toucheront au cœur les générations de travailleurs, venus là se pénétrer d'une grandeur pacifiante que signifient les allégories empruntées à la Nature, aux Arts, aux Jeux et à la famille.
Reoroduction des Joies de la famille - des joies de la Rivière - des jardins
|