Fiche bibliographique

René Jean - "La décoration de la salle d'honneur de l'Université de Poitiers "
Le Petit Provençal---

-Marseille
02-juin 1931 p.1
Contenu sur Girieud
On sait que le peintre Pierre Girieud, originaire de Riez, vient de terminer la décoration de la grande salle d'honneur de l'Université de Poitiers. Ses toiles, exposées, quelques jours au Musée de l'Orangerie, ont pris la route de leur emplacement définitif. On est, à l'heure actuelle, en train de les maroufler. On les inaugurera prochainement lors des fêtes destinées à commémorer la formation de ce centre d'études. Profondément imprégné d'esprit classique, Pierre Girieud fait partie du petit groupe d'artistes qui veulent qu'à la sensation directe se juxtapose, dans un tableau, l'évocation allégorique et mythologique, que la peinture n'abandonne pas le domaine de l'histoire, qu'elle raconte en même temps qu'elle émeut. Par ses idées, par ses travaux antérieurs, il était tout indiqué pour l'oeuvre que lui confia, lors de son trop court passage rue de Valois, M. André François-Poncet. Le salle d'honneur de l'Université de Poitiers de forme rectangulaire, est éclairée sur l'un des côtés, par des fenêtres, entre lesquelles l'artiste a peint, en camaïeu, des nus de gravité ample et sereine symbolisant les Vertus Pédagogiques. Lorsque, on entre, on a ces figures à gauche, tandis que la paroi au fond montre, aux deux côtés d'un monument aux morts, La France Douloureuse, consolant veuves et orphelins et la France victorieuse, à qui deux femmes offrent lyre et lauriers. Face aux fenêtres, quatre grandes compositions séparées par des pilastres, sont consacrées chacune, à l'une des facultés. Le Droit est symbolisé par Lycurgue et le serment spartiate dont la cérémonie est accomplie devant trois personnages aux divers stades de la vie : enfance, virilité et vieillesse, tandis que la foule regarde, massée au fond d'un hémicycle. Les Lettres évoquent Homère chez les bergers : dans un paysage bleuté, de rudes campagnards écoutent l'Aëde tenant sa lyre, assis auprès d'une jeune femme. La Médecine, c'est Esculape à Epidaure, aux côtés d'd'Hygie, sur un socle d'où l'eau s'échappe pour remplir un bassin vers quoi des malades de tous genres accourent à la recherche de la santé. Puis, ce sont les Sciences, que personnifie Pythagore et son école, rangés auprès d'un globe qu'ils étudient, tandis que trois adolescents, jouant aux dés, rappellent la part du hasard dans les découvertes humaines. Sur ces différents thèmes, M. Girieud, sans toutefois chercher une précision archéologique et documentaire, est resté fidèle à l'idéal classique. Le paysage qu'il a évoqué, avec ses collines aux courbes élégantes et son ciel bleu, avec ses arbres où apparaît l'olivier, avec son atmosphère transparente, est tout à fait inspiré de notre Provence et des sites pour lesquels l'artiste proclame, à tous ses salons, son immuable attachement. Le plus grande composition enfin, occupe un entier panneau où s'ouvre la porte. Au-dessus de cette porte, l'Université, assise, drapée et couronnée s'appuie sur deux éphèbes allongés auprès d'elle. A droite et à gauche, sont groupés les principaux monuments de Poitiers et de la région, tandis que au premier plan, en deux groupes, les personnages qui se rattachent à l'histoire locale : Grégoire de Tour, Fortunat, Ste-Radegonde, Charles VII, le duc de Berry, Ronsard, Rabelais, Descartes, Bacon, etc.., sont réunis. Cet ensemble, qui résume en quelque sorte l'histoire, le but, les moyens et les résultats de l'Université, est clair et concis, en son équilibre. La peinture est vigoureuse et d'un beau métier. Le tout, fait honneur à l'artiste. Il y a là près de deux années de travail, et les ressources de la direction des Beaux- Arts sont si modiques que cet ensemble de haute probité artistique rapporte moins à son auteur que le moindre des dioramas qui foisonnent à l'Exposition coloniale.