Le néo-traditionalisme de Pierre Girieud, son sens du style, l'austérité de son dessin permettent d'établir aisément le degré de parenté qui l'unit aux principaux auteurs de notre renaissance décorative. Après que cet artiste eut quitté le naturalisme, afin de fuir l'imitation trop servile de la réalité, il s'astreignit à une autre discipline si sévère que ses toiles et ses dessins datant de cette époque participaient d'une esthétique bysantine. Il est d'ailleurs à remarquer que la réaction contre la décadence italienne à laquelle l'Ecole des Beaux Arts témoigne un attachement, qui ne s'est pas démenti, fut opérée par des peintres épris à de degrés différents de primitivisme : Paul Gauguin, Sérusier, Maurice Denis. Il semble que pour restituer aux arts plastiques ce rythme qui depuis la mort de l'école néo-romaine (lisez : école classique) leur a toujours fait défaut ou ait cru devoir puiser un enseignement aux sources égyptiennes, grecques, archaïques et médiévales du tableau, disait Maurice Denis, est une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées. Tous nos décorateurs, s'inspirant de ce principe, ont su imprimer à la peinture ornementale une direction nouvelle. Aux magnificences des romantiques, dont le rôle consista à réagir contre l'académisme froid, conventionnelle et objectif des élèves de David, a succédé un art serrant de plus près la réalité mais régi par des lois de rythme et d'équilibre de l'obéissance auxquelles dépend la vitalité et la valeur de la plupart des œuvres. Est-il seulement nécessaire de signaler l'influence qu'exercèrent sur les esprits Orientaux en général et les miniaturistes persans en particulier?
Pierre Girieud n'a pas tardé à secouer le joug trop pressant de certains maîtres. Son exposition chez Rosenberg (en 1914) nous montrait déjà un artiste en possession de tous ses moyens. Des projets de vastes compositions, des sites peuplés de personnages drapés à l'antique, des nus à peine stylisés prouvaient de la part de l'exposant la volonté ferme de débarrasser une fois encore la peinture décorative française de cet italianisme qui n'a pas peu contribué à sa corruption. Depuis, dans l'art du paysage il n'a cessé de se perfectionner. L'esprit et la matière de ses toiles les plus récentes marquent un grand pas en avant dans l'évolution de l'artiste. Pierre Girieud prétend atteindre et atteint l'harmonie générale et marche sur les traces de ces deux grands ouvriers de la tradition française qui se nomme Nicolas Poussin et Paul Cézanne. |