Cet atelier (d’un peintre si moderne !)
est l’un des derniers ateliers romantiques, tels que nous les font
connaître quelques lithographies fa
nées. 11 s’adosse au mur de la maison
du crime, c’est-à-dire le Lapin agile ;
on y parle peinture, poésie, musique;
on y fait des poids, de la lutte, de
l’escrime, du Sandow et de la métaphysique. Ce sont ordinairement,
parmi les amis de Girieud, les philo
sophes qui sont forts aux poids et
les athlètes qui brillent aux jeux de
l’esprit. Jadis, Girieud présidait,
couché sur un divan, en caressant sa
barbe. Maintenant, il s’est fait raser
et ressemble à Baudelaire : il préside
en se promenant de long en large, de
huit heures à minuit. Car le romantisme n’est agréable qu’après le repas du soir. Dans la journée, Girieud
travaille. Or, le spectacle d’un artiste
de talent au travail n’a rien de bien
extraordinaire. 11 faut, pour atteindre
à un pittoresque spécial, suppléer par l’affectation au manque de génie.
I On va exproprier Girieud et cela
l’ennuie. Il hait le mouvement, qui
déplace les lignes et confesse, ingenuement. combien il redoute la
lourde ironie des compagnons déménageurs, insensibles aux beautés, non éprouvées, de la peinture moderne. |